Faire vivre la recherche en philosophie, sciences humaines et sociales, pour engager une réflexion critique face aux problèmes du monde contemporain
La guerre a mis fin à l’expression philosophique critique en Russie : les pratiques de dénonciation et d’autocensure sont désormais cultivées dans l’environnement universitaire, poussé par les autorités russes à l’isolement du reste du monde. L’opposition ouverte à la version officielle des événements est passable de licenciement et d’emprisonnement.
L’association internationale des chercheurs en sciences humaines a été fondée en novembre 2022 par des philosophes russes ayant quitté la Fédération de Russie en raison de leur désaccord avec la politique des dirigeants russes, qui a entrainé l’agression militaire contre l’Ukraine et provoqué une catastrophe humanitaire.
Notre association assume la responsabilité de l’avenir de la communauté philosophique de Russie conçue comme partie intégrante de la «république des lettres» mondiale.
Il est important pour nous de maintenir des liens académiques avec des collègues partageant les mêmes idées et dispersés dans le monde entier par la guerre : ceux qui ont quitté la Russie avec la certitude qu’ils ne reviendraient jamais ; ceux qui sont partis en espérant revenir dans une Russie libre ; ceux qui n’ont pas quitté la Russie mais ont basculé dans «l’émigration intérieure» (résistance intérieure). Nous avons l’habitude de travailler ensemble, de nous soutenir mutuellement dans des situations difficiles, nous connaissons nos recherches et nos publications respectives. Nous tenons à cette communauté qui s’est développée au fil des décennies, et il serait impardonnable, sur le plan aussi bien humain que professionnel, de la laisser dépérir. Il nous faut rester ensemble, s’entraider, préserver le désir de se comprendre, sans perdre la confiance et l’intérêt que nous avons les uns pour les autres.
Notre objectif est d’aider les chercheurs en sciences humaines qui ont quitté la Russie et qui continuent d’émigrer à rester dans la profession. Nous créons un nouvel espace intellectuel dans lequel les chercheurs russophones pourront poursuivre leurs travaux sans entrave.
Le but de notre association est de soutenir les voix de la philosophie russe contemporaine dans le dialogue international en organisant des discussions, des séminaires, des tables rondes, des ateliers philosophiques, et en publiant des monographies et des ouvrages collectifs. Nous nous sommes réunis afin d’entreprendre une analyse philosophique et une conceptualisation des événements catastrophiques qui se déroulent sous nos yeux. Nous poursuivrons nos recherches, nous réfléchirons aux expériences personnelles et collectives d’auto-identification dans une situation d’émigration, nous écrirons de nouveaux livres grâce auxquels les gens pourront étudier la philosophie et apprendre à nouveau à vivre en paix les uns avec les autres.
L’association est axée sur le partenariat avec des collègues étrangers et vise à faciliter l’intégration des scientifiques qui ont quitté la Russie dans des projets académiques internationaux. Nous nous réjouissons de l’adhésion des scientifiques étrangers à notre association, du travail commun et de la coopération inter-institutionnelle.
Nous remercions nos collègues étrangers de leur soutien, de leur hospitalité, de leur compréhension et de leur intérêt pour notre travail et pour nos efforts afin de maintenir vivante notre communauté. C’est très important, cela ne s’oublie pas.
Au moment de sa création, notre association compte des personnes basées en France, en Allemagne, en Israël, en Italie, aux Etats-Unis, en Chine, en Grèce, en Arménie, en Géorgie, au Kazakhstan et en Ouzbékistan. Grâce aux moyens de communication modernes, nous sommes ensemble.
Il est important pour nous de maintenir des liens académiques avec des collègues partageant les mêmes idées et dispersés dans le monde entier par la guerre : ceux qui ont quitté la Russie avec la certitude qu’ils ne reviendraient jamais ; ceux qui sont partis en espérant revenir dans une Russie libre ; ceux qui n’ont pas quitté la Russie mais ont basculé dans «l’émigration intérieure» (résistance intérieure). Nous avons l’habitude de travailler ensemble, de nous soutenir mutuellement dans des situations difficiles, nous connaissons nos recherches et nos publications respectives. Nous tenons à cette communauté qui s’est développée au fil des décennies, et il serait impardonnable, sur le plan aussi bien humain que professionnel, de la laisser dépérir. Il nous faut rester ensemble, s’entraider, préserver le désir de se comprendre, sans perdre la confiance et l’intérêt que nous avons les uns pour les autres.
Notre objectif est d’aider les chercheurs en sciences humaines qui ont quitté la Russie et qui continuent d’émigrer à rester dans la profession. Nous créons un nouvel espace intellectuel dans lequel les chercheurs russophones pourront poursuivre leurs travaux sans entrave.
Le but de notre association est de soutenir les voix de la philosophie russe contemporaine dans le dialogue international en organisant des discussions, des séminaires, des tables rondes, des ateliers philosophiques, et en publiant des monographies et des ouvrages collectifs. Nous nous sommes réunis afin d’entreprendre une analyse philosophique et une conceptualisation des événements catastrophiques qui se déroulent sous nos yeux. Nous poursuivrons nos recherches, nous réfléchirons aux expériences personnelles et collectives d’auto-identification dans une situation d’émigration, nous écrirons de nouveaux livres grâce auxquels les gens pourront étudier la philosophie et apprendre à nouveau à vivre en paix les uns avec les autres.
L’association est axée sur le partenariat avec des collègues étrangers et vise à faciliter l’intégration des scientifiques qui ont quitté la Russie dans des projets académiques internationaux. Nous nous réjouissons de l’adhésion des scientifiques étrangers à notre association, du travail commun et de la coopération inter-institutionnelle.
Nous remercions nos collègues étrangers de leur soutien, de leur hospitalité, de leur compréhension et de leur intérêt pour notre travail et pour nos efforts afin de maintenir vivante notre communauté. C’est très important, cela ne s’oublie pas.
Au moment de sa création, notre association compte des personnes basées en France, en Allemagne, en Israël, en Italie, aux Etats-Unis, en Chine, en Grèce, en Arménie, en Géorgie, au Kazakhstan et en Ouzbékistan. Grâce aux moyens de communication modernes, nous sommes ensemble.
Objectifs de l’association
Objectifs de l’association
Soutien des voix de la pensée critique libre en langue russe
Diffusion et valorisation de la recherche et de l’éducation dans le domaine de la philosophie, des sciences humaines et sociales.
Soutien aux philosophes et aux collègues issus d’autres domaines scientifiques contraints à l’émigration.
Organisation d’événements scientifiques et publics (présentations, conférences, séminaires, tables rondes) en lien avec les activités de l’association.
Mise en place d’un dialogue avec des collègues en France et à l’étranger.
Axes de recherche de l’association
IV.
Quelle est la logique historique et sociopolitique des événements qui se déroulent sous nos yeux?
I.
II.
III.
Quels sont les défis actuels de la philosophie à la lumière de l’agression militaire russe contre l’Ukraine indépendante?
En quoi la communauté universitaire peut-elle être tenue responsable de la crise actuelle et quelle pourrait être sa contribution pour s’en sortir?
Quel rôle jouent les écoles et traditions philosophiques nationales dans le monde contemporain?
Événements
11 décembre, 18:00–20:00
Thomas Sturm: Rationality, irrationality, and the war in Ukraine
Many influential policy and security experts and politicians have voiced fundamentally different judgments about whether Putin’s decision to invade Ukraine should be called ‘rational’ or ‘irrational’, without clarifying their assumptions, however. Using this case, I discuss general conditions for determining such rationality assessments. The question is more complex than common debates assume, due to the fragmentation of the concept of rationality. After careful analysis of the major views of rationality in philosophy and the social sciences - including the impact of rationalization, of biases, and of competing normative standards of rationality - I show that there are clear and defensible assumptions to be made. As I argue, Putin’s decision was subjectively instrumentally rational, including many aspects of calculation and reasoning. At the same time, it was not objectively instrumentally rational: right from the start, he had numerous mistaken beliefs and desires and used flawed collective deliberation procedures. Such rationality assessments can be made without the benefit of hindsight, and without questionable mind-reading from a distance; most of them also do not require considering whether Putin’s decisions and actions are morally rational. This type of rationality analysis should be useful for decision-makers in politics and for negotiations, in this case as well as in others. I will also discuss how this analysis relates to discussions over „realism" versus „liberalism“ in international relations and political science.
Séminaire de l'Institut de Philosophie Indépendant Les outils philosophiques dans l’analyse des défis contemporains au Centre d’histoire des philosophies modernes de la Sorbonne ( HIPHIMO )
17, rue de la Sorbonne 75005 Paris
Séminaire organisé par Dr. Prof. Yulia Sineokaya
Les outils philosophiques dans l’analyse des défis contemporains
Depuis le siècle des Lumières et le célèbre débat sur la philosophia popularis, la philosophie a été confrontée à plusieurs reprises à la question de son utilité auprès d’un large public et de sa capacité à fournir des réponses aux défis contemporains. Cette philosophie « populaire » peut-elle conserver son caractère systématique ou doit-elle se réinventer méthodologiquement pour résoudre des problèmes spécifiques ? Au regard de la perspective d’aujourd’hui, cette question semble plus pertinente que jamais, étant donné la complexité des problèmes posés par les crises politiques, économiques et existentielles qui menacent la stabilité des structures démocratiques et provoquent des changements sociaux rapides.
Notre séminaire vise, d’une part, à appliquer les outils philosophiques pour analyser une diversité de problèmes interdisciplinaires contemporains. Cela englobe les évolutions récentes et en cours dans les domaines sociaux et politiques, ainsi que les découvertes scientifiques et les tendances culturelles. D’autre part, il s’agit étudier les phénomènes du monde moderne en les replaçant dans le contexte de l’histoire de la philosophie. Cet objectif est également une tentative de répondre à la critique croissante selon laquelle la philosophie contemporaine s’intéresse principalement à des problèmes abstraits détachés des questions de la vie réelle. Nombre de nos sujets sont associés à la Russie, car les événements survenus depuis février 2022 ont considérablement influencé le paysage politique et intellectuel international.
2023
25 septembre, 18:00–20:00
Dr. Dr. Alexey Zhavoronkov (Goethe-Universität Frankfurt)
Russia’s ‘New conservatism’ as Pseudo-Conservatism
23 octobre, 18:00–20:00
Dr. Prof. Evert van der Zweerde (Radboud University)
Political Philosophy in Russia – Incurable Imperial Mindset?
20 novembre, 18:00–20:00
Dr. Prof. Antoine Arjakovsky (Collège des Bernardins)
Avec le retour de la guerre en Europe le nécessaire dépassement de l’amnésie occidentale et les voies possibles de jugement des crimes du communisme
Dr. Yurii Latysh (European Humanities University of Vilnius)
Ukraine's Memory Politics during the War
11 décembre, 18:00–20:00
Dr. Prof. Thomas Sturm (Universitat Autònoma de Barcelona)
Rationality, irrationality, and the war in Ukraine
Séminaire organisé par Dr. Prof. Yulia Sineokaya
Les outils philosophiques dans l’analyse des défis contemporains
Depuis le siècle des Lumières et le célèbre débat sur la philosophia popularis, la philosophie a été confrontée à plusieurs reprises à la question de son utilité auprès d’un large public et de sa capacité à fournir des réponses aux défis contemporains. Cette philosophie « populaire » peut-elle conserver son caractère systématique ou doit-elle se réinventer méthodologiquement pour résoudre des problèmes spécifiques ? Au regard de la perspective d’aujourd’hui, cette question semble plus pertinente que jamais, étant donné la complexité des problèmes posés par les crises politiques, économiques et existentielles qui menacent la stabilité des structures démocratiques et provoquent des changements sociaux rapides.
Notre séminaire vise, d’une part, à appliquer les outils philosophiques pour analyser une diversité de problèmes interdisciplinaires contemporains. Cela englobe les évolutions récentes et en cours dans les domaines sociaux et politiques, ainsi que les découvertes scientifiques et les tendances culturelles. D’autre part, il s’agit étudier les phénomènes du monde moderne en les replaçant dans le contexte de l’histoire de la philosophie. Cet objectif est également une tentative de répondre à la critique croissante selon laquelle la philosophie contemporaine s’intéresse principalement à des problèmes abstraits détachés des questions de la vie réelle. Nombre de nos sujets sont associés à la Russie, car les événements survenus depuis février 2022 ont considérablement influencé le paysage politique et intellectuel international.
2023
25 septembre, 18:00–20:00
Dr. Dr. Alexey Zhavoronkov (Goethe-Universität Frankfurt)
Russia’s ‘New conservatism’ as Pseudo-Conservatism
23 octobre, 18:00–20:00
Dr. Prof. Evert van der Zweerde (Radboud University)
Political Philosophy in Russia – Incurable Imperial Mindset?
20 novembre, 18:00–20:00
Dr. Prof. Antoine Arjakovsky (Collège des Bernardins)
Avec le retour de la guerre en Europe le nécessaire dépassement de l’amnésie occidentale et les voies possibles de jugement des crimes du communisme
Dr. Yurii Latysh (European Humanities University of Vilnius)
Ukraine's Memory Politics during the War
11 décembre, 18:00–20:00
Dr. Prof. Thomas Sturm (Universitat Autònoma de Barcelona)
Rationality, irrationality, and the war in Ukraine
Projets
Actualités
23 octobre
Seminar de Evert van der Zweerde: Political Philosophy in Russia – Incurable Imperial Mindset?
Studying and analyzing political philosophy in Russia is not a simple task. It is, to an extent, an exercise in Comparative Political Philosophy, but only to an extent, or “half”, as Russian philosophy obviously has largely the same roots as its West-European counterpart: Ancient Greek Philosophy, Christianity, Enlightenment, German Idealism, and, not to forget, Marxism. The Russian and the West-European philosophical traditions are, in many respects, each other’s inside constitutive other, so are we dealing with a comparison between philosophical cultures or within a shared European one? Moreover, and more importantly, we should address the question of political philosophy “as such”: if all forms of human society have a political dimension, we may want to look for a common basis of all manifestations of political philosophy, wherever and in whichever form they occur. From this angle, the very title of a book called Russian Political Philosophy can be contested by asking if it should not rather be called Political Philosophy in Russia. Even book titles have a political (as well as a commercial) dimension.
Against the background of these questions, I will address three further notions that seem to set the stakes of the discussion: anarchy, authority, autocracy. This “triple A” suggests a specificity (rather than a uniqueness) of political-philosophical thought in Russia and in Russian (with the additional, far from obvious question: where to find it? partly in odd places…). The latter part of this sentence, however, raised new questions, that have become, arguably, more pressing than they ever were as a result of the current military conflict in Ukraine that some will describe as “Russia’s War” while others persist in calling it “Special Military Operation” - turning contemporary Russian society into a “special operation” in the process. Is a neutral, distanced approach possible in this case? While we always should seek nuance and perspective, we cannot, nor should we abstain from judging, nor can we avoid the question how to assess the current conflict, which can be described, alternatively but not mutually exclusively, as a clash between civilizations, as a geopolitical conflict between two of several large blocks -Schmittian Großräume [large spaces]- in a multipolar world, or as part of the yet-not-processed Russian as well as Soviet past – the total absence of Vergangenheitsbewältigung [coming to terms with the past], which not accidentally is a German word.
Presupposing, despite all differences, continuity rather than rupture when it comes to the Tsarist Russian Empire, the Union of Soviet Socialist Republics and the present-day Russian Federation, we need to address the question if and how the current situation is nourished and / or legitimized by important strands and concepts in the tradition of political-philosophical thinking in Russia / Soviet Union. While, again, simplification must be avoided, we can identity, I will suggest, a specific dynamics of, on the one hand, an imperial and, by implication, Russo-Centric logic that comes in two variants, a belligerent and a benevolent (and paternalistic) one, and, on the other hand, an anti-colonial and, by implication, plural logic than emphasizes national identity and, politically, sovereignty and self-determination. This dynamics can then, finally, be tied back to the concepts of “empire” and “nation-state” as the two main alternative models of political modernity, both standing in opposition to alternatives that challenge the very notion of “statehood”. The specificity, albeit not uniqueness, of the Russian case would then be the historical fact of an expanding empire that incorporates, by whatever means, its blizhnеe zarubezh’e rather than establishing a colonial empire with overseas colonies.
One of the very few good things about the current military conflict in Ukraine is that it forces us to readdress, reassess and reinvestigate the anyway complicated reality of Russian political philosophy.
Against the background of these questions, I will address three further notions that seem to set the stakes of the discussion: anarchy, authority, autocracy. This “triple A” suggests a specificity (rather than a uniqueness) of political-philosophical thought in Russia and in Russian (with the additional, far from obvious question: where to find it? partly in odd places…). The latter part of this sentence, however, raised new questions, that have become, arguably, more pressing than they ever were as a result of the current military conflict in Ukraine that some will describe as “Russia’s War” while others persist in calling it “Special Military Operation” - turning contemporary Russian society into a “special operation” in the process. Is a neutral, distanced approach possible in this case? While we always should seek nuance and perspective, we cannot, nor should we abstain from judging, nor can we avoid the question how to assess the current conflict, which can be described, alternatively but not mutually exclusively, as a clash between civilizations, as a geopolitical conflict between two of several large blocks -Schmittian Großräume [large spaces]- in a multipolar world, or as part of the yet-not-processed Russian as well as Soviet past – the total absence of Vergangenheitsbewältigung [coming to terms with the past], which not accidentally is a German word.
Presupposing, despite all differences, continuity rather than rupture when it comes to the Tsarist Russian Empire, the Union of Soviet Socialist Republics and the present-day Russian Federation, we need to address the question if and how the current situation is nourished and / or legitimized by important strands and concepts in the tradition of political-philosophical thinking in Russia / Soviet Union. While, again, simplification must be avoided, we can identity, I will suggest, a specific dynamics of, on the one hand, an imperial and, by implication, Russo-Centric logic that comes in two variants, a belligerent and a benevolent (and paternalistic) one, and, on the other hand, an anti-colonial and, by implication, plural logic than emphasizes national identity and, politically, sovereignty and self-determination. This dynamics can then, finally, be tied back to the concepts of “empire” and “nation-state” as the two main alternative models of political modernity, both standing in opposition to alternatives that challenge the very notion of “statehood”. The specificity, albeit not uniqueness, of the Russian case would then be the historical fact of an expanding empire that incorporates, by whatever means, its blizhnеe zarubezh’e rather than establishing a colonial empire with overseas colonies.
One of the very few good things about the current military conflict in Ukraine is that it forces us to readdress, reassess and reinvestigate the anyway complicated reality of Russian political philosophy.
20 Novembre
Seminar de Antoine Arjakovsky: Avec le retour de la guerre en Europe le nécessaire dépassement de l’amnésie occidentale et les voies possibles de jugement des crimes du communisme et de l’impérialisme
Antoine Arjakovsky, Docteur en Histoire, Directeur de recherche au Collège des Bernardins
Nous savons que le non jugement des crimes du passé communiste conduit à leur justification puis à leur répétition. Le kholodomor, le génocide par le froid pratiqué par la Russie contre l’Ukraine au cours de l’hiver 2022-2023, une population de plus de 40 millions d’habitants, est la répétition tragique du Kholodomor, le génocide par la faim auquel s’est livré, sur ordre de Staline, l’Union soviétique pour écraser l’Ukraine indépendante, un crime contre l’humanité qui fit plus de 5 millions de morts. De même alors qu’au début du XXIe siècle on croyait la Chine respectait le droit international, en 2013, le président Xi Jinping appela à « méthodiquement mener le travail de propagande externe » et à « mieux raconter l’histoire de la Chine et faire entendre la voix de la Chine ». Dix ans plus tard, le 21 novembre 2023, Lu Shaye, ambassadeur de Chine en France, nia sur LCI la souveraineté des pays issus de l'Union soviétique. Les pays de l'ex-URSS "n'ont pas le statut effectif dans le droit international parce qu'il n'y a pas d'accord international pour concrétiser leur statut de pays souverain", a-t-il notamment déclaré. L’ambassadeur chinois a également questionné l'appartenance de la Crimée à l'Ukraine, un territoire que la Russie occupe depuis 2014. "Cela dépend de comment on perçoit ce problème", a-t-il indiqué. "Il y a l'Histoire. La Crimée était, tout au début, à la Russie. C'est Khrouchtchev qui a offert la Crimée à l'Ukraine dans l'époque de l'Union soviétique." Pour le diplomate chinois, il faut arrêter de "chicaner" sur la question des frontières post-soviétiques.
Pour sortir de l’amnésie d’un côté, et de la propagande de l’autre, il convient de réhabiliter l’histoire authentique, fondée en métaphysique, capable de montrer la vérité, de faire émerger un récit thérapeutique, capable de guérir en profondeur les mémoires blessées, les ressentiments et les volontés de vengeance. On se propose au cours de cette brève intervention premièrement de mettre à jour la réalité du conflit mémoriel à la base de la guerre actuelle entre la Russie et l’Ukraine. Puis on rappellera certaines tentatives de jugement des crimes du communisme, notamment celle de Vladimir Boukovski, et on présentera brièvement la proposition de l’historien russe Nikolai Epplee de démocratisation du travail de justice historique. Enfin on insistera sur le fait que, comme l’avait déjà remarqué Nicolas Berdiaev qui comparait la 3e internationale communiste à la Troisième Rome impériale, la mythologie communiste est elle-même liée à la mythologie impérialiste sur un plan historique mais aussi à un niveau métaphysique. Ce n’est qu’en procédant à la purification de la théologie politique impériale qu’on parviendra à se libérer des démons qui hantent la conscience russe et, au-delà, la conscience européenne.
Nous savons que le non jugement des crimes du passé communiste conduit à leur justification puis à leur répétition. Le kholodomor, le génocide par le froid pratiqué par la Russie contre l’Ukraine au cours de l’hiver 2022-2023, une population de plus de 40 millions d’habitants, est la répétition tragique du Kholodomor, le génocide par la faim auquel s’est livré, sur ordre de Staline, l’Union soviétique pour écraser l’Ukraine indépendante, un crime contre l’humanité qui fit plus de 5 millions de morts. De même alors qu’au début du XXIe siècle on croyait la Chine respectait le droit international, en 2013, le président Xi Jinping appela à « méthodiquement mener le travail de propagande externe » et à « mieux raconter l’histoire de la Chine et faire entendre la voix de la Chine ». Dix ans plus tard, le 21 novembre 2023, Lu Shaye, ambassadeur de Chine en France, nia sur LCI la souveraineté des pays issus de l'Union soviétique. Les pays de l'ex-URSS "n'ont pas le statut effectif dans le droit international parce qu'il n'y a pas d'accord international pour concrétiser leur statut de pays souverain", a-t-il notamment déclaré. L’ambassadeur chinois a également questionné l'appartenance de la Crimée à l'Ukraine, un territoire que la Russie occupe depuis 2014. "Cela dépend de comment on perçoit ce problème", a-t-il indiqué. "Il y a l'Histoire. La Crimée était, tout au début, à la Russie. C'est Khrouchtchev qui a offert la Crimée à l'Ukraine dans l'époque de l'Union soviétique." Pour le diplomate chinois, il faut arrêter de "chicaner" sur la question des frontières post-soviétiques.
Pour sortir de l’amnésie d’un côté, et de la propagande de l’autre, il convient de réhabiliter l’histoire authentique, fondée en métaphysique, capable de montrer la vérité, de faire émerger un récit thérapeutique, capable de guérir en profondeur les mémoires blessées, les ressentiments et les volontés de vengeance. On se propose au cours de cette brève intervention premièrement de mettre à jour la réalité du conflit mémoriel à la base de la guerre actuelle entre la Russie et l’Ukraine. Puis on rappellera certaines tentatives de jugement des crimes du communisme, notamment celle de Vladimir Boukovski, et on présentera brièvement la proposition de l’historien russe Nikolai Epplee de démocratisation du travail de justice historique. Enfin on insistera sur le fait que, comme l’avait déjà remarqué Nicolas Berdiaev qui comparait la 3e internationale communiste à la Troisième Rome impériale, la mythologie communiste est elle-même liée à la mythologie impérialiste sur un plan historique mais aussi à un niveau métaphysique. Ce n’est qu’en procédant à la purification de la théologie politique impériale qu’on parviendra à se libérer des démons qui hantent la conscience russe et, au-delà, la conscience européenne.
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