De nombreuses questions ont trait à la normativité. Au niveau le plus primitif, toutes ces questions peuvent être divisées en deux types. Dans le premier cas, on essaye de découvrir des détails importants concernant les concepts et les jugements normatifs : sémantiques, métaphysiques, épistémologiques. La méta-éthique traite de ces questions. Un exemple typique d’une telle question est : « Quelle est la signification des énoncés éthiques ? ». Dans la mesure où la réponse à ces questions n’est pas pertinente pour l’objectif de notre séminaire, nous les mettrons entre parenthèses.
Mais quel est donc notre objectif ? Quelles sont les questions qui nous intéressent ? Ces questions concernent l’aspect prescriptif des jugements normatifs, aspect exprimé dans la fameuse question « Que dois-je faire ? ». La réponse à cette question kantienne est explicitement ou implicitement supposée dans toutes nos interactions avec les autres. De plus, cette réponse, quelle qu’elle soit, est présupposée dans toutes nos interactions avec le monde qui ne sont pas purement cognitives, c’est-à-dire elle appartient, dans le langage de Kant, au domaine de la raison pratique. En philosophie, diverses disciplines tentent de répondre à la question « Que dois-je faire ? », mais si nous cherchons la réponse la plus générale, nous devons nous tourner vers l’éthique normative. Il y a plusieurs raisons pour lesquelles nous devrions nous tourner vers l’éthique normative plutôt que d’essayer de résoudre, en la contournant, les dilemmes éthiques auxquelles nous sommes confrontés presque tous les jours.
Nous pouvons commencer par le fait que toute discussion, y compris celle concernant des dilemmes pratiques, exige que les participants acceptent des principes communs, sinon les arguments des parties s’avéreront (conceptuellement) incommensurables, et la discussion elle-même dégénérera en un échange d’opinions sans intérêt. Dans le meilleur des cas, l’éthique normative aide à trouver des principes communs pour de telles discussions pratiques ; dans un scénario moins optimiste, elle aide à identifier de tels principes qui peuvent être conventionnellement considérées comme généraux, même s’ils ne prétendent pas être l’expression d’une loi morale. Un autre argument en faveur de l’importance de l’éthique normative est qu’elle permet, en théorie, d’identifier et de séparer les types d’arguments normatifs, qui, avec un certain degré de convention, peuvent être divisés en déontiques, conventionnalistes et arétiques. Enfin, l’éthique normative peut être nécessaire pour formuler des principes destinés à régir son propre comportement. Ainsi, l’objectif de l’étude de cette discipline s’étend non seulement au domaine public, mais également au domaine privé.
Le séminaire se déroulera sous la forme d’un atelier de lecture. Pour chaque séance, nous lirons des textes et partagerons des opinions sur ce que nous aurons lu, en nous appuyant sur le texte. Dans ma présentation, j’adopterai une approche à la fois historique et structurelle. D’une part, je tâcherai d’établir une liste chronologique des textes étudiés, en prenant en compte leur influence sur les discussions ultérieures. D’autre part, je m’efforcerai de souligner les différences entre les principaux types de théories éthiques normatives. Ainsi, notre séminaire s’articulera autour d’un cadre standard divisant les théories éthiques normatives en déontologiques, conséquentialistes et arétiques. Bien sûr, c’est une vue d’ensemble ; en ajustant le point de vue, il faudra y ajouter le contractualisme de Hobbes et celui de Scanlon, entre autres. Nous examinerons également des textes qui remettent en question la division tripartite mentionnée ci-dessus, que ce soit en révisant les fondements de cette division ou en tentant de combiner des théories habituellement considérées comme concurrentes.
Reading List:
1. William David Ross:
[OJ] “The Basis of Objective Judgements in Ethics,” International Journal of Ethics, 37(2) (1927): 113–127.
[RG] The Right and the Good, Oxford: Oxford University Press, 1930.
[FE] Foundations of Ethics, Oxford: Oxford University Press, 1939.
Secondary sources:
Audi, Robert, 1996, “Intuitionism, Pluralism, and the Foundations of Ethics,” in W. Sinnott-Armstrong and M. Timmons (eds.), Moral Knowledge?: New Readings in Moral Epistemology, Oxford: Oxford University Press, pp. 101–136.
–––, 2004, The Good in the Right: A Theory of Intuition and Intrinsic Value, Princeton: Princeton University Press.
Broad, C. D., 1940, Review of Foundations of Ethics by W. D. Ross, Mind, 49(194): 228–239.
2. Immanuel Kant:
Kant, I., 1785, Groundwork of the Metaphysic of Morals, H.J. Paton (trans.), New York: Harper and Row, 1964.
Commentary: [KT] Kant’s Ethical Theory: A Commentary on the Grundlegung zur Metaphysik der Sitten, Oxford: Oxford University Press, 1954.
3. Bentham, Jeremy, 1789, An Introduction to the Principles of Morals and Legislation, J. H. Burns and H. L. A. Hart (eds.), Oxford: Oxford University Press, 1996.
4. Dancy, Jonathan, 1991, “An Ethic of Prima Facie Duties,” in Peter Singer (ed.), A Companion to Ethics, Oxford: Blackwell, pp. 219–229.
–––, 2004, Ethics Without Principles, Oxford: Oxford University Press.
5. Mill, J. S., 1861. Utilitarianism, edited with an introduction by Roger Crisp. New York: Oxford University Press, 1998.
6. Moore, G. E., 1903. Principia Ethica, Cambridge: Cambridge University Press.
–––, 1912. Ethics, New York: Oxford University Press.
7. Nozick, R., 1974. Anarchy, State, and Utopia, New York: Basic Books.
- Hawkins, J.,. “The Experience Machine and the Experience Requirement”, The Routledge Handbook of the Philosophy of Well-Being.
8. Nussbaum, Martha C., 2000. Women and Human Development: The Capabilities Approach, New York: Cambridge University Press.
9. Sidgwick, H., 1907. The Methods of Ethics, seventh edition, London: Macmillan; first edition, 1874.
Additional literature:
Singer, P., 1974. “Sidgwick and Reflective Equilibrium”, Monist, 58: 490–517.
10. Brandt, R., 1979. A Theory of the Good and the Right, New York: Oxford University Press. (N.B. – exposition and defense of preference utilitarianism)
–––, 1992. Morality, Utilitarianism, and Rights, Cambridge: Cambridge University Press.
11. Hurka, T., 1993. Perfectionism, New York: Oxford University Press.
–––, 2001. Virtue, Vice, and Value, New York: Oxford University Press.
12. Sen, A., 1979. “Utilitarianism and Welfarism”, Journal of Philosophy, 76: 463–89.
–––, 1982. “Rights and Agency”, Philosophy and Public Affairs, 11(1): 3–39.
–––, 1985. “Well-Being, Agency, and Freedom”, Journal of Philosophy, 82(4): 169–221.
–––. 2002. Rationality and Freedom, Cambridge, MA: Harvard University Press.
13. Rawls, J., 1955. “Two Concepts of Rules”, Philosophical Review, 64: 3–32.
–––, 1971. A Theory of Justice, Cambridge, MA: Harvard University Press.
14. Foot, P., 1967. “Abortion and the Doctrine of Double Effect”, Oxford Review, 5: 28–41.
–––, 1983. “Utilitarianism and the Virtues”, Proceedings and Addresses of the American Philosophical Association, 57(2): 273–83; revised in Mind, 94 (1985): 196–209.
15. Railton, P., 1984. “Alienation, Consequentialism, and the Demands of Morality”, Philosophy and Public Affairs, 13: 134–71; reprinted in Railton 2003.
–––, 2003. Facts, Values, and Norms: Essays toward a Morality of Consequence, Cambridge: Cambridge University Press.
16. Sen, A., and Williams, B. (eds.), 1982. Utilitarianism and Beyond, Cambridge: Cambridge University Press.
- Scanlon, T. M., 1982. “Contractualism and Utilitarianism”, in Sen and
Williams (eds.) 1982.
17. Singer, P., 1974. “Sidgwick and Reflective Equilibrium”, Monist, 58: 490–517.
–––, 1993. Practical Ethics, Second Edition. Cambridge: Cambridge University Press.
–––, 2005. “Ethics and Intuitions”, The Journal of Ethics, 9(3/4): 331–352.
18. Smart, J. J. C., 1956. “Extreme and Restricted Utilitarianism”, The Philosophical Quarterly, 6: 344–54.
–––, 1973. “An Outline of a System of Utilitarian Ethics” in Utilitarianism: For and Against, by J.J.C. Smart and B. Williams. Cambridge: Cambridge University Press, pp. 3–74.