Observatoire de bioéthique comparative
Les experts en bioéthique et les scientifiques s’accordent généralement à dire que les défis rencontrés dans certaines régions du monde peuvent avoir des répercussions sur l’ensemble de l’humanité. [1] Les défis auxquels sont confrontés les systèmes de santé nationaux, qui peuvent avoir un impact mondial (comme nous l’avons vu pendant la pandémie de COVID-19), ne constituent pas la seule menace. La diffusion de technologies biomédicales particulières et de pratiques biopolitiques plus complexes revêt également une importance mondiale. Par conséquent, il est crucial d’examiner les risques qui surviennent dans les pays qui revendiquent une « voie distinctive » pour développer la bioéthique et la biotechnologie.

De plus en plus souvent en Russie et Bélarus, la primauté des réglementations nationales sur les réglementations internationales est interprétée comme une opportunité de ne pas respecter les normes éthiques internationales les plus fondamentales, telles que la Déclaration d’Helsinki. Les discussions sur la bioéthique sont souvent étouffées ou remplacées par des discours sur la biosécurité, la politique démographique et la concurrence technologique avec les « pays inamicaux ». Le dialogue public sur les questions de bioéthique est pratiquement inexistant en raison des menaces qui pèsent sur la carrière et la liberté des participants potentiels, ainsi que de la diminution rapide du nombre d’espaces de dialogue. Dans cette situation, il est essentiel de préserver la coopération internationale, qui permet une analyse comparative au profit de toutes les parties.

En Russie et Bélarus, la liberté de reproduction des femmes, [2] le droit des patients de protéger la confidentialité de leurs données médicales, [3] ainsi que l’accès à des soins médicaux sûrs sont tous menacés. [4] Le projet de collecte du matériel génétique des citoyens, en particulier des minorités ethniques, et l’obligation de supprimer les obstacles juridiques à l’édition du génome humain [5] témoignent de la volonté de créer de nouvelles formes de biopolitique. La génétique et l’immunologie sont devenues des métaphores courantes pour les interventions administratives dans la culture et l’éducation. En conséquence, les nouvelles stratégies biopolitiques sont soutenues par une idéologie d'exceptionnalisme culturel et politique qui justifie la violation des normes et des pratiques internationales acceptées. [6]

Dans ce contexte, nous, bioéthiciens, philosophes et chercheurs en sciences humaines médicales, avons décidé de créer un Observatoire de bioéthique comparative. Son objectif est de surveiller, d’identifier et d’analyser les causes, les caractéristiques et les conséquences potentielles des processus décrits ci-dessus.
Les débats bioéthiques s’apparentent à la démocratie in vitro. [7] Nous sommes convaincus que notre travail ouvert et transparent contribuera à la promotion du dialogue public sur les questions de bioéthique et aidera à renforcer la société civile en Russie et Bélarus.

En tant qu’Observatoire de bioéthique comparative, notre objectif est de produire une analyse indépendante et critique de la réglementation éthique et juridique de la médecine, des soins de santé, de la biotechnologie et des pratiques biopolitiques impliquant à la fois des êtres humains et non-humains en Russie et Bélarus.
  1. Analyse des normes juridiques et des réglementations éthiques récemment adoptées, rédigées et en vigueur en Russie et Bélarus dans les domaines des soins de santé, de la biotechnologie et de la gestion de l'environnement du point de vue de leur conformité avec les normes bioéthiques internationales; comparaison avec les tendances du développement de la bioéthique dans d’autres pays.
  2. Collection de cas bioéthiques russes et discussion ouverte sur ces cas.
  3. Analyse des tendances et des modes émergents de la biopolitique et de la biosocialité; évaluation des risques sociaux et humanitaires régionaux et mondiaux associés.
L’Observatoire est composé d’experts internationaux en bioéthique, soins de santé, droit médical, anthropologie philosophique et sciences humaines médicales. Leur objectif est de mener une analyse approfondie et comparative des réglementations éthiques et juridiques en matière de médecine, de soins de santé et de pratiques biopolitiques, impliquant à la fois des humains et des non-humains.

Les résultats de leur travail comprendront des rapports analytiques et des recommandations, des articles scientifiques et des monographies, ainsi que des publications dans les médias traditionnels et sociaux. Ils organiseront également des tables rondes, des séminaires universitaires et des débats publics pour discuter des résultats de leurs recherches.
Préambule
Objectifs et champ du projet
Domaines clés de la recherche
Format
[1] Ten Have, H. (2022). The challenges of global bioethics. Global Bioethics 33(1), 41-44.
[5] Paul Rabinow a proposé d’appeler cette forme émergente “biosocialité”. Rabinow, P. (1992). Artificiality and enlightenment: from sociobiology to biosociality. In The Ethics of Biotechnology (pp. 101-122). Routledge.
[7] Hyun, I. (2017). Bioethics: Democracy in vitro. Nature 541, 462–463.
Membres: Alexey Zhavoronkov, Volha Davydzik, Nadzeya Ilyushenka, Anna Ozhiganova